René Houray, le Ridellois

L'ancêtre des familles Houré, des familles Grandmont, d'une branche des familles Laferrière et Guérard de Nouvelle-France se nommait René Houray. À son mariage, ce dernier déclare être le fils de Jacques Houray et de Marguerite Castillon. Son lieu d'origine : Azay-le-Rideau en Touraine, France, un village situé à mi-chemin entre Tours et Chinon.

La lecture du registre paroissial nous apprend qu'il y a un fils de Jacques Houré au prénom de René baptisé le 7 janvier 1629. Le prénom de la mère toutefois semble être Martine Castillon et non Marguerite. N'ayant pu trouver d'autres données pour corroborer l'information du présent baptême, nous ne pouvons conclure avec certitude qu'il s'agit bien là de l'acte de baptême de l'ancêtre.

De plus, nous apprenons que l'ancêtre René Houray a une sœur au nom de Jehanne, baptisée le 25 janvier 1631 en la paroisse Saint-Symphorien d'Azay-le-Rideau. Le nom de la marraine est Jehanne Castillon, probablement une tante de l'enfant. Le nom du parrain est illisible. Son prénom pourrait bien être Claude.


Blason d'Azay-de-Rideau

Blason d'Azay-le-Rideau tel qu'on peut le voir à la mairie de l'endroit

Église St-Symphorien
Église d'Azay-le-Rideau en Touraine


L'Atelier du Centre généalogique de Touraine dans son ouvrage intitulé Présence tourangelle au Canada au XVIIe siècle publié en 1996, nous apprend de plus qu'une Marguerite Castillon a été marraine lors de deux baptêmes à l'église Saint-Symphorien, soit les 9 décembre 1629 au baptême de Gabriel Castillon et 14 juin 1632 au baptême d'une autre Marguerite Castillon, fille de Georges et de Renée Meslin.

Pour les auteurs de ce document, le surnom de GRANDMONT de René AURÉ rappelle l'ancien prieuré du même nom qui se trouvait à Tours. Il faut souligner que le ridellois René Houray n'a jamais porté le surnom de Grandmont, que ce soit dans les actes religieux ou notariés. C'est son fils Jean qui a pris ce surnom peut-être pour se différencier de son frère Pierre qui a porté le surnom de Laferrière et de son autre frère Joseph qui a porté le surnom de Lagirodière. L'information concernant le prieuré Grandmont de Tours est cependant intéressante. Peut-être que René Houray y a séjourné un temps pour devenir un moine grandmontain, un disciple de Saint-Étienne, fondateur de l'ordre. Son fils Jean voulant peut-être rappeler ce fait a choisi le surnom de Grandmont.

Ce prieuré Grandmont a bel et bien existé et fut remplacé par le château Grandmont. Ce dernier était entouré d'une prairie aménagée en jardins des plus exotiques. Cet ensemble était situé un peu au sud de Tours et à quelques kilomètres au nord-est d'Azay-le-Rideau. Aujourd'hui un complexe universitaire d'importance occupe l'ancienne prairie Grandmont et celle-ci a été annexée à la grande ville. Une avenue de Tours a porté au siècle dernier et porte encore le nom de Grammont malgré que l'ordre des grandmontains et grandmontaines se soit dissout en 1769.

La présence d'un autre prieuré Grandmont a été révélée en 1971 par J. Maurice dans son livre Azay-le-Rideau et sa région à travers l'histoire. Ce prieuré était situé à Saint-Benoit le long de l'ancienne route gallo-romaine reliant Azay-le-Rideau et Chinon, près de l'abbaye Turpenay. Il avait été construit près d'une source nommée Pommiers-aigres. Voici ce qu'il en est advenu selon J. Maurice :

En conclusion, nous pouvons penser que les frères Houray ont tout simplement pris comme surnoms les noms des lieux géographiques qui ont marqués l'enfance de leur père. Les sources d'information nous manquent pour développer davantage ces hypothèses.

Pourquoi René Houray a-t-il quitté Azay-le-Rideau ce coin enchanteur de Touraine pour les arpents de neige du Canada et la civilisation iroquoise? Goût de l'aventure, foi chrétienne, argent, conseils d'amis? Ajoutez à cela la peste (dysenterie et fièvre typhoïde) qui décimait régulièrement la population et les hordes de loups qui s'attaquaient sauvagement aux enfants des villages environnants ...
 

Le départ de Saint-Nazaire en 1653

La Compagnie de Montréal a financé la grande recrue de 1653, la recrue de Jeanne Mance de l'Hôtel-Dieu de Montréal. Messieurs Chomedey de Maisonneuve et Jérôme Le Royer de la Dauversière en étaient les promoteurs. L'objectif : sauver Ville-Marie et la Nouvelle-France, ployant alors sous les attaques constantes des Iroquois.

Selon Étienne-Michel Faillon dans son Histoire de la colonie française en Canada, la majorité des recrues ont signé leur contrat d'engagement de cinq ans chez le notaire Pierre de Lafousse à La Flèche mais pas René Houray. Ce contrat notarié de l'ancêtre reste à découvrir. Ce dernier a toutefois signé une reconnaissance d'avancement sur ses gages à la Compagnie de Montréal pour une somme de 123 livres devant le notaire Belliot et ce, à bord du Saint-Nicolas-de-Nantes dans la rade de Saint-Nazaire, tout juste avant son départ pour la Nouvelle-France. Le titre de cet important document du notaire Belliot est Rolle des Homes envoies a Montreal en l'année 1653 et de ce qui a esté accordé de gages à chacun d'eux selon Marie-Claire Daveluy dans son article « Le Drame de la recrue de 1653 » publié dans la Revue d'histoire de l'Amérique française en 1953. René Houray s'est donc engagé comme colon-soldat pour la période de juin 1653 à juin 1658 à Montréal. En contrepartie, la Compagnie de Montréal s'engageait à le nourrir et le loger pendant cette même période, de lui payer un montant de 75 livres annuellement et de lui payer son voyage de retour en France à l'échéance du contrat.

En fait, le bateau sur lequel s'est embarqué l'ancêtre était tellement pourri qu'il a fait demi-tour après 350 lieues, puis fait escale sur l'île Saint-Nicolas-les-Défunts pour débarquer les passagers et enfin achève son périple à Saint-Nazaire selon l'historien Michel Langlois dans son livre Montréal 1653, la grande recrue, publié en 2003. Les marins et passagers en sont quitte pour une bonne peur. Finalement, ce n'est donc que le 20 juillet que s'effectua le véritable départ sur le même navire, radoubé cette fois. Cet important délai sema l'inquiétude en Nouvelle-France car l'étreinte des Iroquois sur la jeune colonie se resserrait chaque jour de plus en plus. L'arrivée du Saint-Nicolas à Québec le 22 septembre donna donc lieu à plusieurs célébrations. La colonie était sauvée mais pas le navire. En effet, selon Faillon dans sa Vie de la Soeur Beourgeoys publiée en 1853, ce dernier a frappé des récifs devant Québec. Le capitaine Pierre Le Besson dut donc se résoudre à le faire brûler sur place car il était complètement irrécupérable. Puis Monsieur de Lauzon, gouverneur général, voulu retenir les recrues à Québec en retardant volontairement le prêt de chaloupes nécessaires à la poursuite du voyage vers Montréal. Monsieur de Maisonneuve finit toutefois par avoir gain de cause.

René Houray a donc fait sa longue et pénible traversée de l'Atlantique en compagnie de Paul Chomedey de Maisonneuve et de Marguerite Bourgeoys pour débarquer à Ville-Marie le 16 novembre 1653. Puis après, il a exercé le métier de défricheur en plus de participer à plusieurs combats contre les Iroquois. Plusieurs de ses compagnons de voyage y trouvèrent d'ailleurs la mort. L'ancêtre a donc entendu lors de pow wow's, ces tambours et ces chants iroquois qui ont semé l'effroi chez plus d'un pionnier de la Nouvelle-France.
 

Contrats devant notaire

René Houray a rompu le 28 avril 1660 un contrat comme engagé des Jésuites chez les Onnontagués, une des cinq nations du peuple iroquois, installée dans l'actuel État de New York, au sud de la ville de Syracuse. Le fait est rapporté dans le Journal des Jésuites. On sait par ailleurs que les Robes-Noires avaient établi une mission, Sainte-Marie de Gannentaha, à cet endroit sur les bords du lac Onondaga, à l'été 1656 pour rejoindre les quelques 3 000 Onnontagués d'alors. Cet établissement faisant rager les Agniers, une autre des nations iroquoises, les Français durent finalement évacuer en toute hâte le 20 mars 1658 selon René Chartrand dans son livre intitulé Le patrimoine militaire canadien, publié en 1993. Est-ce que René Houray faisait partie de ce groupe de téméraires missionnaires, de soldats et de colons sous les ordres du commandant Dupuy? Nous ne pouvons l'affirmer dans l'état actuel de notre recherche.

Puis René Houray reçut une concession de deux arpents de front au Cap-de-la-Madeleine du père Allouez, de la Compagnie de Jésus, le 22 décembre 1662, devant le notaire Laurent du Portail. Ce contrat vient contredire les informations publiées en 1955 par Rolland-J. Auger comme quoi René Houray serait repassé en France pendant la période de 1660 à 1665. Houray s'est donc installé dans un premier temps tout près de Trois-Rivières.

Enfin le 17 mars 1665, devant le notaire Ameau dit Saint-Sévérin, René a reçu une autre concession de deux arpents de front par quarante de profondeur à Champlain, du seigneur de Champlain, Étienne Pézard De LaTouche. D’autres colons ont également reçu des concessions au même contrat : François Choret, Pierre Disy, Foucher dit Laforest, Charles Bonin, Urbain Baranger, Pierre Niquet, Charles Dutau et Michel Feuillion.

Le 14 juin 1666, devant le notaire Jacques de Latouche (no 172), René Houray vend à Nicolas Gastineau dit Duplessis une terre au petit chenal des Trois-Rivières et une maison située dans le fort Saint-François au Cap-de-la-Madeleine.


Le mariage de René Houray

Le contrat de mariage entre René et Denise Damasné a été passé chez le notaire Jacques de Latouche le 26 octobre 1665, selon les généalogistes Jetté, Langlois et Lebœuf. Il y a bien à cette date, dans ce qui nous parvenu du minutier du notaire de Latouche, la signature de René Houray dans deux contrats de mariage mais René y a signé comme témoin et non comme marié. À l'index des actes notariés du notaire de Latouche, le contrat de mariage entre René et Denise est répertorié au 26 octobre 1667. Après vérification aux Archives nationales du Québec des Trois-Rivières qui conserve la greffe du notaire de Latouche, il n'y a rien à cette autre date. Aux Archives nationales du Québec de Montréal et de Québec, rien non plus. Toutefois, il semble que René Houray était déjà marié en 1667 puisque il est déclaré comme tel au recensement de 1666. Le contrat a toutefois pu être écrit après le mariage. Le contrat de mariage de l'ancêtre ne se trouve pas non plus dans le greffe du notaire Guillaume de Larue au 26 octobre 1667 comme l'a mentionné André Lafontaine dans son Recensement annoté Nouvelle France 1681, publié en 1981.


Signature de René Houray

Signature de l'ancêtre René Houray dans un contrat d'acquet passé le 14 juin 1666
devant le notaire Jacques De La Tousche


Néanmoins le généalogiste Léandre Lamontagne, vers 1920, lors d'une recherche au Palais de justice de Trois-Rivières, a pris quelques notes dans un petit cahier noir à partir du fameux contrat de mariage de René. Ces bribes d'informations ont été léguées à Archange Godbout, son collaborateur, lequel en a tiré, en réponse à une lettre d'une dame Gabrielle Laferrière de Montréal le 17 janvier 1951, les informations suivantes :

Honorable homme René Houray, fils de Jacques et de
Marguerite Castillon, de la paroisse d'Izay-le-Rideau,
province de Tours, et de Denise Damesni, fill de maître
Michel Damesi (sic) et de Dame Catherine Taureau, de Saint-
Jean-en-Grève, à Paris.

Le généalogiste Godbout situe la rédaction de ce contrat au 26 octobre 1665 et déplore dans le même document que les registres de Champlain de 1665 à 1679 aient disparu ne permettant pas de contre-vérifier l'information.


Recensements

Au recensement de 1666 au petit Cap-de-la-Magdelaine, René Houray déclare avoir 36 ans alors qu'au recensement de 1667, il n'a plus que 35. Son épouse suit une progression plus normale en passant de 25 à 26 ans.

Au recensement de 1681 du petit village de Champlain, René Houray déclare avoir atteint la cinquantaine alors que son épouse a atteint la quarantaine. Cinq enfants habitent la maison paternelle. Il s'agit de René (14 ans), Denise (8 ans), Catherine (6 ans), Jean (4 ans) et Joseph (1 an).  Sa terre compte quinze arpents mis en valeur, trois bêtes à corne et deux fusils. À ce décompte, il faut toutefois ajouter deux autres enfants, Pierre (12 ans) et Marie (10 ans). Le généalogiste Marcel Guérard de Hartford dans l'État du Connecticut les a retrouvés, l'un chez François Breton et l'autre chez Laurent Gouin où ils sont recensés comme domestiques.

Après le décès de sa femme survenu le 22 septembre 1704, l'ancêtre René Houray décède à son tour à Champlain le 11 juin 1706 et y est inhumé le lendemain.
 

Les enfants de René Houray

Les actes de baptême de René, Marie-Thérèse, Marie-Denise, Jean, Catherine et Pierre sont introuvables.


Descendance René Houray

Maurice Vallée
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En complément, voici une petite page d'histoire contemporaine, à partir de l'intersection des rues Éloi-de Grandmont
et Charles Orillon à Nicolet.

Et voici une image de saint Symphorien, patron de la paroisse d'Azay-le-Rideau.

Statue de saint Symphorien


Brève bibliographie

AUGER, Roland-Joseph. La Grande Recrue de 1653, Société généalogique canadienne-française, Montréal, 1955, 205 p.

ATELIER DU CENTRE GÉNÉALOGIQUE DE TOURAINE. Présence tourangelle au Canada au XVIIe siècle, Centre généalogique de Touraine, 1996, 65 p.

CHARTRAND, René. Le patrimoine militaire canadien, d'hier à Aujourd'hui, tome 1, Art Global, Montréal, 1993, 239 p.

DAVELUY, Marie-Claire. « Le Drame de la recrue de 1653 », Revue d'histoire de l'Amérique française, vol. VII, no 2, Montréal, 1953, 307 p.

FAILLON, Étienne-Michel. Histoire de la colonie française en Canada, vol. 2, 1865, 568 p.

FAILLON, Étienne-Michel. Vie de la soeur Bourgeoys, vol. 1, 1853, 406 p.

LANGLOIS, Michel. Montréal 1653, la grande recrue, Éditions du Septentrion, Sillery, 2003, 269 p.

LÉPINE, Jean-Guy. « René Houray dit Grandmont », Nos Sources, vol. 31, no 4, Société de généalogie de Lanaudière, Joliette, 2011, p. 172-189.

LORANGER-TESSIER, Monique-G. « Descendance de René Houray dit Grandmont et de Denise Damané (Desmani), fille du roi à Champlain, 350 ans sur la même terre (1665-2015) », L'Ancêtre, vol. 42, no 315, Société de généalogie de Québec, Ste-Foy, été 2016, p. 269-273.

MAURICE, J. Azay-le-Rideau et sa région à travers l'histoire, Tours, 1971, 195 p.

MONDOUX, Sœur. « Les Hommes de Montréal », Revue d'histoire de l'Amérique française, vol. II, no 1, Montréal, 1948, 307 p.


Page créée le 17 juillet 1998 et mise à jour le 5 août 2020
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